Projet d’habitat groupé
Rahier
2012






Texte rédigé par le groupe, le 12 janvier 2012 :
« Avoir lieu Un groupe de personnes entre Bruxelles, Liège et le Condroz namurois réfléchit depuis assez longtemps, sur base de constats écologiques, sociaux, politiques, tout autant que culturels et spirituels, à fonder une communauté de vie.
Ce qui sous-tend ce projet est bien plus étendu qu’un simple projet d’habitat groupé. Il s’agit pour nous aujourd’hui de constituer au quotidien, au cœur de nos vies, une réponse aux exigences liées aux questions de notre temps. Nous désirons vivre au quotidien d’autres écologies. […]
La question de l’écologie entendue dans son sens le plus large (concrète, mais aussi politique, sociale, psychique et spirituelle) nous semble liée fondamentalement aux valeurs et à l’ontologie de l’occident.
Aujourd’hui, le capitalisme a atteint un degré d’exploitation maximal dont les ravages ne font plus de doute. Mais l’entreprise continue. Elle est relayée et entretenue au quotidien par deux grands réseaux d’anesthésie qui sont l’approvisionnement continu en énergie fossile et les réseaux industriels mass médiatiques. Leur couplage procure aux individus l’illusion d’être libres et libérés de la « Nature » en alimentant cette anesthésie au moyen de deux armes : le confort et le divertissement.
Ces deux armes constituent les deux fléaux de la civilisation occidentale et de ses valeurs de domination, qui, couplée à la puissance industrielle, est aujourd’hui devenue mondiale. Nous désirons aujourd’hui que ces questions s’inscrivent dans notre quotidien.
Au fil des années les catastrophes écologiques nous ont mis devant l’urgence de réagir. Et pourtant, il nous semble qu’elles ne pourront pas être affrontées, et la destruction de la terre transfigurée, sans que ces questions ne s’ouvrent aux dimensions d’écologie sociale et politique qui permettraient les transformations. Une forme de capitalisme vert peut donner bonne conscience à certains mais ne changera pas nos rapports d’exploitation volontaire des ressources et des êtres.
Il nous apparaît aujourd’hui qu’il nous faut chercher une troisième voie entre le phantasme d’un gouvernement global et éclairé des citoyens luttant pour une destinée plus équitable (nous n’avons plus rien à attendre d’aucun gouvernement, tous complices de ce processus) et l’illusion de la solution par la transformation individuelle de l’âme humaine construisant le travail sur soi.
Comme c’est un peu partout le cas en Europe et dans le monde aujourd’hui, cette troisième voie nous semble être possible dans la création de lieux, axés avant tout sur la transversalité de ces questions, et leur articulation au sein de la vie quotidienne. La réappropriation des savoirs et des valeurs auxquelles nous avons été arrachés se doit d’articuler de manière vivante les dimensions inévitablement sociales et politiques de ce questionnement, mais aussi les aspects spirituels de notre être au monde, ensemble, avec les autres êtres, humains et non-humains.
Créer un lieu où se pratiquent, se confrontent et se transmettent ces questions, le relier aux autres lieux qui résistent chacun à leur manière, réinventer des pratiques de solidarité forte, de praxis mises en forme, retrouver des rythmes communs, repenser notre questionnement sur l’éthique de nos gestes et de nos actes, exercer nos corps à ces exigences de transformation, renouer des liens enfouis,… Non pas sortir mais au contraire nous inscrire dans les nécessités de ce temps,…. Pratiquer le retournement des valeurs implique de changer nos vies.
Le projet visera l’écologie dans sa constitution matérielle : autonomie énergétique, bioclimatisme, absence de toxiques, matériaux locaux, réflexion sur l’énergie grise.[…]
Il cherchera à mettre en place un maraichage biologique, basé sur les principes de la permaculture et de l’agriculture biodynamique. Tendre vers un maximum d’autonomie alimentaire. L’énergie du lieu et ses possibilités de développement nous semblent fondamentales.
Tenter de constituer une subsistance commune, viser le développement des forces de manière équitable dans le temps, harmoniser les inégalités économiques, chercher l’autogestion et l’autonomie des individus, font partie des aspects d’une écologie sociale et politique qui nous semble aussi indispensable.
Le projet visera à promouvoir la multiplicité et la diversité des formes de vie et des compétences. Il sera volontairement transgénérationnel, et visera à la venue d’êtres d’horizons sociaux et culturels les plus divers. L’ensemble sera favorisé au quotidien par la création d’ateliers de travail, de réflexion et d’échanges.
Il s’agit de penser et d’agir à la fois au dedans et au dehors. Intérieurement, chercher l’équilibre tendu entre appropriation individuelle et espaces collectifs. Les formes juridiques, politiques et symboliques de l’espace sont essentielles à nos yeux.
La création d’une association (type ASBL) à vocation culturelle au sens le plus large pourrait être le maillon essentiel d’une relation équilibrée entre la nécessaire intériorité de la communauté et son ouverture vers l’extérieur.
De ce point de vue, la question de la libération de la terre du point de vue juridique nous semble une dimension fondamentale du lien entre une écologie des pratiques politiques et des pratiques spirituelles.
Résister à l’an-esthésie industrielle du capitalisme ne va pas aujourd’hui pour nous sans la création continue de culture et de sens. Là est l’axe de notre projet : celui-ci devrait accueillir une bibliothèque, une salle de musique et de conférences, et serait aussi un lieu de pratiques du corps (Tai-Chi, Qi-gong, …), de connaissance des plantes, de pratiques artistiques, de peinture, de lecture, de philosophie et de poésie,…Le projet cherche à s’allier toutes les expériences de cultures et de pratiques de vie, portées par des êtres désireux de transmettre.
Cette transmission des savoirs et des savoir-faire se fonde sur une attention particulière au soin. La vie spirituelle, si elle veut se tenir à la hauteur des exigences écologiques, ne peut plus ne pas prendre en compte une transmutation radicale des valeurs spirituelles qui ont fondé la civilisation. « Il pourrait s’avérer qu’inverser les valeurs et rester fidèle à la terre soient des missions qui reviennent à la même chose » (Sloterdijk).
Ces métamorphoses doivent aujourd’hui s’inscrire dans notre quotidien, dans une dimension à la fois thérapeutique, poétique, et collective. Nous sommes convaincus que c’est uniquement à ce prix que se transformera, à notre échelle, la responsabilité qu’a constitué notre civilisation vis-à-vis des autres formes de vie, et que nous portons tous en nous.
L’ouverture de la communauté de vie va de pair avec son identité consciente. L’échelle méditée des lieux, des pratiques, et des moments est à la croisée d’un travail sur notre verticalité, et sur l’horizontalité socio-politique des échanges et des actions avec l’extérieur.
Si l’ensemble de ces propositions exprimée comme ceci bien est entendu incomplète, elle est avant tout à discuter entre nous, à échanger et surtout à mettre en chantier et à vivre au quotidien. »
« Avoir lieu Un groupe de personnes entre Bruxelles, Liège et le Condroz namurois réfléchit depuis assez longtemps, sur base de constats écologiques, sociaux, politiques, tout autant que culturels et spirituels, à fonder une communauté de vie.
Ce qui sous-tend ce projet est bien plus étendu qu’un simple projet d’habitat groupé. Il s’agit pour nous aujourd’hui de constituer au quotidien, au cœur de nos vies, une réponse aux exigences liées aux questions de notre temps. Nous désirons vivre au quotidien d’autres écologies. […]
La question de l’écologie entendue dans son sens le plus large (concrète, mais aussi politique, sociale, psychique et spirituelle) nous semble liée fondamentalement aux valeurs et à l’ontologie de l’occident.
Aujourd’hui, le capitalisme a atteint un degré d’exploitation maximal dont les ravages ne font plus de doute. Mais l’entreprise continue. Elle est relayée et entretenue au quotidien par deux grands réseaux d’anesthésie qui sont l’approvisionnement continu en énergie fossile et les réseaux industriels mass médiatiques. Leur couplage procure aux individus l’illusion d’être libres et libérés de la « Nature » en alimentant cette anesthésie au moyen de deux armes : le confort et le divertissement.
Ces deux armes constituent les deux fléaux de la civilisation occidentale et de ses valeurs de domination, qui, couplée à la puissance industrielle, est aujourd’hui devenue mondiale. Nous désirons aujourd’hui que ces questions s’inscrivent dans notre quotidien.
Au fil des années les catastrophes écologiques nous ont mis devant l’urgence de réagir. Et pourtant, il nous semble qu’elles ne pourront pas être affrontées, et la destruction de la terre transfigurée, sans que ces questions ne s’ouvrent aux dimensions d’écologie sociale et politique qui permettraient les transformations. Une forme de capitalisme vert peut donner bonne conscience à certains mais ne changera pas nos rapports d’exploitation volontaire des ressources et des êtres.
Il nous apparaît aujourd’hui qu’il nous faut chercher une troisième voie entre le phantasme d’un gouvernement global et éclairé des citoyens luttant pour une destinée plus équitable (nous n’avons plus rien à attendre d’aucun gouvernement, tous complices de ce processus) et l’illusion de la solution par la transformation individuelle de l’âme humaine construisant le travail sur soi.
Comme c’est un peu partout le cas en Europe et dans le monde aujourd’hui, cette troisième voie nous semble être possible dans la création de lieux, axés avant tout sur la transversalité de ces questions, et leur articulation au sein de la vie quotidienne. La réappropriation des savoirs et des valeurs auxquelles nous avons été arrachés se doit d’articuler de manière vivante les dimensions inévitablement sociales et politiques de ce questionnement, mais aussi les aspects spirituels de notre être au monde, ensemble, avec les autres êtres, humains et non-humains.
Créer un lieu où se pratiquent, se confrontent et se transmettent ces questions, le relier aux autres lieux qui résistent chacun à leur manière, réinventer des pratiques de solidarité forte, de praxis mises en forme, retrouver des rythmes communs, repenser notre questionnement sur l’éthique de nos gestes et de nos actes, exercer nos corps à ces exigences de transformation, renouer des liens enfouis,… Non pas sortir mais au contraire nous inscrire dans les nécessités de ce temps,…. Pratiquer le retournement des valeurs implique de changer nos vies.
Le projet visera l’écologie dans sa constitution matérielle : autonomie énergétique, bioclimatisme, absence de toxiques, matériaux locaux, réflexion sur l’énergie grise.[…]
Il cherchera à mettre en place un maraichage biologique, basé sur les principes de la permaculture et de l’agriculture biodynamique. Tendre vers un maximum d’autonomie alimentaire. L’énergie du lieu et ses possibilités de développement nous semblent fondamentales.
Tenter de constituer une subsistance commune, viser le développement des forces de manière équitable dans le temps, harmoniser les inégalités économiques, chercher l’autogestion et l’autonomie des individus, font partie des aspects d’une écologie sociale et politique qui nous semble aussi indispensable.
Le projet visera à promouvoir la multiplicité et la diversité des formes de vie et des compétences. Il sera volontairement transgénérationnel, et visera à la venue d’êtres d’horizons sociaux et culturels les plus divers. L’ensemble sera favorisé au quotidien par la création d’ateliers de travail, de réflexion et d’échanges.
Il s’agit de penser et d’agir à la fois au dedans et au dehors. Intérieurement, chercher l’équilibre tendu entre appropriation individuelle et espaces collectifs. Les formes juridiques, politiques et symboliques de l’espace sont essentielles à nos yeux.
La création d’une association (type ASBL) à vocation culturelle au sens le plus large pourrait être le maillon essentiel d’une relation équilibrée entre la nécessaire intériorité de la communauté et son ouverture vers l’extérieur.
De ce point de vue, la question de la libération de la terre du point de vue juridique nous semble une dimension fondamentale du lien entre une écologie des pratiques politiques et des pratiques spirituelles.
Résister à l’an-esthésie industrielle du capitalisme ne va pas aujourd’hui pour nous sans la création continue de culture et de sens. Là est l’axe de notre projet : celui-ci devrait accueillir une bibliothèque, une salle de musique et de conférences, et serait aussi un lieu de pratiques du corps (Tai-Chi, Qi-gong, …), de connaissance des plantes, de pratiques artistiques, de peinture, de lecture, de philosophie et de poésie,…Le projet cherche à s’allier toutes les expériences de cultures et de pratiques de vie, portées par des êtres désireux de transmettre.
Cette transmission des savoirs et des savoir-faire se fonde sur une attention particulière au soin. La vie spirituelle, si elle veut se tenir à la hauteur des exigences écologiques, ne peut plus ne pas prendre en compte une transmutation radicale des valeurs spirituelles qui ont fondé la civilisation. « Il pourrait s’avérer qu’inverser les valeurs et rester fidèle à la terre soient des missions qui reviennent à la même chose » (Sloterdijk).
Ces métamorphoses doivent aujourd’hui s’inscrire dans notre quotidien, dans une dimension à la fois thérapeutique, poétique, et collective. Nous sommes convaincus que c’est uniquement à ce prix que se transformera, à notre échelle, la responsabilité qu’a constitué notre civilisation vis-à-vis des autres formes de vie, et que nous portons tous en nous.
L’ouverture de la communauté de vie va de pair avec son identité consciente. L’échelle méditée des lieux, des pratiques, et des moments est à la croisée d’un travail sur notre verticalité, et sur l’horizontalité socio-politique des échanges et des actions avec l’extérieur.
Si l’ensemble de ces propositions exprimée comme ceci bien est entendu incomplète, elle est avant tout à discuter entre nous, à échanger et surtout à mettre en chantier et à vivre au quotidien. »